Je mets ma collection de mode en dépôt-vente : quelles précautions juridiques prendre ?

dépôt-vente collection de vêtement
Le premier article de cette série consacrée à la commercialisation des collections de votre marque de mode porte sur le modèle du dépôt-vente.

Vous avez repéré quelques boutiques qui correspondent à l’univers de votre marque, dans lesquelles vous souhaitez proposer vos collections ?

Avant de les contacter, préparez-vous aussi sur le plan juridique ! Voici les points à prendre en compte.

Ça y est, vous avez enfin entre vos mains les vêtements de votre première collection ! Il s’agit maintenant de les commercialiser. Bien sûr, vous avez un site e-commerce, mais vous aimeriez aussi proposer vos produits en boutique.  

Quel modèle économique pour vendre sa collection de mode en boutique ? 

Si vous ne disposez pas de votre propre local, deux solutions s’offrent à vous : la vente en gros à des détaillants ou le dépôt-vente. 

La première option consiste à vendre certaines pièces de votre collection à un détaillant, à des prix professionnels, à charge pour lui de les revendre à sa clientèle. C’est la solution qui vous permet d’obtenir immédiatement de la trésorerie, à réinvestir par exemple dans la production d’une nouvelle collection. Cependant, c’est le commerçant qui prend le risque. S’il n’arrive pas à écouler les pièces, il devra gérer le stock d’invendus. 

C’est pourquoi, face à de jeunes marques, certaines boutiques proposent l’alternative du dépôt-vente. Les vêtements sont alors exposés en boutique, et lorsqu’une pièce est vendue, le montant de la vente est reversé au créateur, diminué d’une commission conservée par la boutique. Cette solution présente l’avantage, pour une marque émergente, de bénéficier d’une visibilité et d’offrir l’expérience d’une vente en magasin à ses clientes, avec la possibilité d’essayer le vêtement. Le commerçant pour sa part dispose de marchandises originales à proposer dans sa boutique. Il propose ainsi du renouveau à sa clientèle sans avancer de frais. 

Quelles sont les considérations juridiques à prendre en compte en matière de dépôt-vente? 

Le dépôt vente, qu’est ce que c’est ? 

Le fonctionnement du dépôt-vente est assez simple : vous confiez vos créations à un commerçant, lequel se chargera de les vendre pour votre compte. Il s’agit donc d‘un modèle économique intéressant pour les jeunes créateurs ne disposant pas de point de vente physique mais ayant pour ambition d’exposer leurs marchandises en boutique.  

A noter que vous demeurez propriétaire de vos créations. En effet, le commerçant expose vos articles dans sa boutique mais en cas d’échec de la vente il aura l’obligation de vous restituer les invendus. A ce titre, le commerçant a donc la qualité de dépositaire.

Se pose alors la question du prix de vente de vos articles. Ce dernier peut être fixé d’un commun accord avec le gérant du point de vente. En revanche, lors de la fixation du prix vous devez impérativement prendre en compte le fait que, en contrepartie de l’exposition de vos créations dans sa boutique, le commerçant percevra une commission. Aucune règle juridique n’encadre la fixation de la commission. Il vous reviendra donc à nouveau de vous accorder avec le commerçant sur le montant du taux de commission. Certains contrats de dépôt-vente prévoient également que ce taux puisse varier en fonction de la durée du dépôt. 

Lors de vos négociations avec le commerçant, prenez en compte la marge que doit réaliser chaque partie pour que l’opération soit rentable, notamment au regard de la question de la TVA.

Comment gérer la TVA en dépôt-vente

Si vous êtes auto-entrepreneur non soumis à la TVA, vos prix ne sont peut-être pas établis en tenant compte de cet impôt. Si les boutiques que vous contactez sont assujetties à la TVA, ce qui est fort probable, il faudra en tenir compte lors de la fixation de la commission. 

Le commerçant pratiquant le dépôt-vente dans sa boutique peut être qualifié, juridiquement parlant, d’intermédiaire transparent. En effet, comme nous l’avons déjà mentionné, il n’est pas propriétaire des biens qu’il vend en tant que dépositaire. Il se contente de faire le lien entre vous, marque de mode, et l’acheteur, particulier.

En tant qu’intermédiaire transparent, le commerçant réalise une prestation de service. A ce titre, il obéit au régime fiscal correspondant. S’il est soumis à la TVA, il en est redevable  au taux de TVA normal de 20%. Ce taux s’applique sur les commissions que l’intermédiaire perçoit à chaque vente.

Si vous êtes soumis à la TVA, vous en serez redevable au taux de 20% sur le montant perçu lors de chaque vente, ce dernier correspondant au produit d’une vente à un particulier. 

Comment mettre en place le dépôt-vente ?

Une fois que vous avez rencontré la bonne personne avec qui faire affaire, comment concrétiser tout cela ? Tout simplement par le biais d’un contrat. Juridiquement parlant le dépôt-vente est en réalité le résultat non pas d’une, mais de deux opérations ! D’une part un dépôt, réglementé par les articles 1915 à 1953 du Code civil, et d’autre part un mandat de vente, régi par les articles 1984 à 2010 du Code civil. Mais pas de panique, ces deux actions peuvent très bien se matérialiser par la signature d’un seul et même contrat.

Aucun régime spécifique n’encadre le contrat de dépôt-vente, il est donc soumis au droit commun des contrats et au principe de liberté contractuelle, conformément à l’article 1102 du Code civil. A ce titre, la rédaction d’un contrat écrit n’est pas obligatoire. Cependant, il est vivement recommandé de sécuriser votre relation commerciale en établissant un contrat écrit et signé par chacune des parties. En cas de litige avec le gérant du point de vente, cet écrit sera un précieux atout. Une fois signé, conservez donc chacun un exemplaire du document.

En ce qui concerne le contenu de votre contrat, libre à vous d’y insérer les clauses qui vous semblent être appropriées, après négociation avec le  commerçant dépositaire. 

Il est possible que le commerçant en question souhaite prévoir le paiement de frais de dépôt : dans ce cas, vous devrez régler au gérant de la boutique des frais si vous deviez récupérer certaines de vos créations invendues. Dans la même optique, il est possible que figure au contrat une clause prévoyant la baisse des prix de la marchandise déposée au bout d’un certain temps. 

Bon à savoir : si le commerçant dépositaire décide, de manière unilatérale, de baisser le prix des vêtements, par exemple dans le cadre d’une promotion, cela ne pourrait pas avoir d’incidence sur le montant reversé au propriétaire des marchandises – sauf accord préalable de ce dernier. 

Quelles sont les obligations des parties au contrat de dépôt-vente ? 

Comme dans toute relation contractuelle, chaque partie est soumise au respect de certaines obligations. 

1- Les obligations du dépositaire

Le commerçant a une obligation de vendre la marchandise qui lui a été confiée en dépôt. Cependant cette obligation est une obligation de moyens et non pas une obligation de résultat. En d’autres termes, le commerçant n’engagera pas sa responsabilité s’il ne parvient pas à vendre vos créations. En revanche, il pourra voir sa responsabilité être engagée s’il ne met pas tous les moyens qu’il a en sa possession afin de parvenir à la vente. Dans cette optique, il doit donc exposer vos biens dans sa boutique ou encore les promouvoir. Si vous souhaitez que certaines caractéristiques de vos produits soient mises en avant, vous devez en informer officiellement le commerçant, par exemple en annexant des instructions au contrat. 

Le gérant du point de vente est également responsable de vos articles. En effet, si vous en demeurez l’unique propriétaire jusqu’à leur vente, le commerçant est toutefois le gardien de la marchandise qui lui a été déposée. A ce titre, si ladite marchandise venait à être détériorée ou encore détruite, il en sera considéré comme l’unique responsable, à moins qu’il parvienne à démontrer son absence de faute. Pensez à vérifier que la boutique dispose d’une assurance. 

Enfin, lorsque vous procédez à la remise effective de vos créations, la pratique consiste à établir une fiche de dépôt signée des deux parties. Chacun en conserve une copie. La fiche de dépôt comporte des informations essentielles telles que le prix que vous avez convenu de fixer, le numéro de dépôt ou encore la description des marchandises et la quantité déposée.

2- Les obligations du déposant 

En tant que créateur déposant, vous ne transférez pas la propriété de votre marchandise au commerçant et restez donc le seul propriétaire. Cependant, cette qualité ne vous permet pas de procéder vous-même à la vente de ces mêmes biens alors que vous avez mandaté un tiers pour se charger de la vente à votre place. Veillez donc à mettre à jour le stock sur votre site e-commerce lorsque vous laissez des articles en dépôt-vente ! 

D’autre part, si un acheteur constate après l’achat d’un de vos produits que ce dernier comporte un vice caché ou un défaut de conformité, c’est votre responsabilité qui sera engagée et non pas celle du commerçant qui, rappelons-le, était un simple intermédiaire.  Prévoyez donc dans le contrat la procédure à suivre en cas de réclamation du client final. 

Dans la seconde partie de cette série d’article sur la commercialisation des collections de votre marque de mode, nous aborderons le régime juridique de la vente à des professionnels (B2B). 

Vous avez besoin d’un accompagnement juridique pour structurer la commercialisation de vos collections ? Consultez les services du cabinet et prenez rendez-vous avec votre avocate.

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