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ToggleLa question des droits d’auteur est trop souvent laissée de côté, ou traitée de manière secondaire, alors même qu’elle constitue pour le styliste une opportunité d’optimiser sa rémunération.
La rémunération des stylistes indépendants (non salariés) qui créent des articles de mode pour des entreprises tierces peut être calculée de différentes manières. Elle est souvent forfaitaire. Elle correspond alors au temps passé par le styliste multiplié par son taux horaire, ou encore à la valeur de sa prestation sur le marché.
Dans certains cas, la marque cliente du styliste lui demande de signer un contrat prévoyant que le prix convenu pour la prestation inclut la contrepartie de la cession des droits d’auteur. D’autres contrats favorables aux marques prévoient que les créations seront des oeuvres collectives dont les droits reviennent automatiquement à la marque.
Voici ce que vous devez savoir sur le plan juridique en tant que styliste de mode pour optimiser vos revenus et protéger vos droits.
Les droits d’auteur des stylistes sur leurs créations de mode
Les prestations des stylistes peuvent aboutir à des créations de mode qui sont originales. Celles-ci bénéficient automatiquement de la protection offerte par le droit d’auteur à l’article L.111-1 du Code de propriété intellectuelle.
En tant que styliste, vous devez tout d’abord avoir conscience du fait que vous êtes titulaire des droits d’auteur sur vos créations répondant au critère légal d’originalité, et ce même si vous les avez réalisées sur commande pour une autre entreprise.
Le droit d’auteur se subdivise en deux sous-catégories : les droits patrimoniaux et extra-patrimoniaux. Les droits extra-patrimoniaux aussi appelés les droits moraux sont indissociables de la personne de l’auteur et ne peuvent être cédés.
Les droits moraux, à l’inverse des droits patrimoniaux sont perpétuels, inaliénables et imprescriptibles (article L.121-1 du Code de la propriété intellectuelle).
En tant que styliste vos droits moraux sont :
- le droit à la “paternité” qui se traduit par le droit au respect de votre nom, de votre qualité d’auteur,
- le droit au respect de l’intégrité de vos créations de mode, c’est à dire notamment que personne ne peut les modifier sans votre accord ;
- le droit de divulgation qui se traduit par le droit de rendre publiques pour la première fois vos créations de mode,
- le droit de repentir et de retrait qui vous permet, même si vous avez cédé votre droit d’exploitation, de faire cesser l’exploitation de vos créations à condition d’indemniser l’entreprise du préjudice causé.
Ainsi, vous pouvez exiger que l’entreprise qui dépose vos créations de mode en tant que dessin ou modèle à l’INPI ou EUIPO mentionne votre identité d’auteur officiellement. Il s’agit d’une forme d’exercice de votre droit moral, de votre droit à la paternité.
La nécessité d’établir une cession de droits d’auteur patrimoniaux par écrit
Lorsque vous acceptez de céder vos droits patrimoniaux à votre client, certaines règles de forme doivent être respectées pour que la cession soit valable.
Le contrat de cession de droit d’auteur doit être établi par écrit. Il doit notamment préciser, conformément à l’article article L.131-3 du CPI : l’étendue géographique, temporelle ainsi que la description des droits cédés. Il doit également prévoir une rémunération adéquate, qui vient s’ajouter à la somme facturée pour la réalisation des créations.
Le risque d’annulation d’une cession de droits d’auteur à titre gratuit
⚠️ La cession non-rémunérée de droits d’auteur est considérée comme une donation.
Or, les donations effectuées sans notaire sont nulles. Cela signifie que le contrat de cession des droits d’auteur sur les créations de mode est annulé rétroactivement. Ainsi, ce contrat n’est censé n’avoir jamais existé. Ceci est source d’insécurité juridique pour vous, styliste, et votre client, marque de mode.
Pour éviter cela, il sera obligatoire de prévoir une rémunération adéquate dans le contrat de cession.
Les éléments du calcul de la rémunération de la cession de droit d’auteur patrimoniaux sur une création de mode
Le calcul de la rémunération d’un styliste indépendant pour la cession de ses droits d’auteur patrimoniaux peut varier en fonction de divers critères.
Le caractère exclusif ou non de la cession
En règle générale, les stylistes indépendants réalisent leurs créations destinées exclusivement à une entreprise qui va les fabriquer et les commercialiser. L’entreprise doit payer le prix de cette exclusivité. En effet, elle lui permet d’avoir un avantage sur les autres opérateurs du marché de la mode, puisque le styliste ne pourra pas céder à une seconde entreprise les créations déjà cédées. La cession exclusive doit être rémunérée plus fortement que la cession non-exclusive.
L’étendue des droits cédés
La marque de mode souhaite dans la plupart des cas disposer du maximum de droits sur les créations des stylistes. Or, il paraît évident que plus les droits cédés seront nombreux, plus la rémunération du styliste devra être élevée.
L’étendue géographique de la cession
Il est d’usage que les stylistes indépendants cèdent leurs droits à leurs clients pour le monde entier, notamment en raison de la commercialisation sur internet. Cette cession de droit très large doit être rémunérée en conséquence.
La durée de la cession
Une cession d’une faible durée sera rémunérée plus faiblement qu’une cession d’une durée plus importante. Si l’entreprise souhaite continuer à exploiter les créations des stylistes au-delà de la période initiale, elle devra renouveler ou prolonger le contrat de cession et verser une rémunération complémentaire.
Forfait ou rémunération proportionnelle: quel choix pour la cession des droits ?
Le principe : la rémunération proportionnelle
L’article L.131-4 du Code de la propriété intellectuelle précise qu’en principe la rémunération d’un styliste auteur doit être appropriée et proportionnelle aux recettes provenant de la vente ou de l’exploitation de la création.
Cela signifie que, généralement, un styliste doit être payé en fonction des recettes générées par l’exploitation de ses créations. Cette rémunération peut prendre la forme d’un pourcentage sur les ventes des créations réalisées par l’entreprise. Ce pourcentage devra indéniablement être approprié.
Dans ce cas, il est essentiel en pratique que le contrat de cession prévoie un mécanisme de suivi des ventes des créations. Par exemple, le contrat de cession peut prévoir que l’entreprise s’engage à envoyer tous les six mois un rapport comptable de la vente des créations.
L’exception : la rémunération forfaitaire
Toutefois, ce même article permet dans certains cas de rémunérer forfaitairement la cession de droits d’auteur.
En effet, il arrive que la rémunération proportionnelle d’un styliste ne soit pas possible. Par exemple,
- l’entreprise est nouvelle et la base de calcul ne peut être pratiquement déterminée ou bien les frais des opérations de calcul seraient trop élevés.
- quand les ventes des créations auront lieu dans un délai trop important.
Lorsque la rémunération proportionnelle n’est pas possible, les stylistes pourront évaluer forfaitairement leur rémunération. Cette rémunération forfaitaire pourra être versée en une ou plusieurs fois.
⚠️ Le styliste qui percevrait une rémunération forfaitaire trop faible, c’est-à-dire qui subit un préjudice d’au moins sept douzième, pourra provoquer la révision du prix du contrat de cession (article L.131-5 du Code de la propriété intellectuelle).
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