Je lance une application mobile dans la mode : quels enjeux juridiques ?

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Vous développez une application mobile dans le secteur de la mode ?

Même gratuite, la mise à disposition d’une application mobile vous engage juridiquement dès sa mise en ligne. Mentions, CGU, RGPD, traceurs… on fait le point sur les règles à respecter, et les documents à prévoir.

Les applications mobiles sont aujourd’hui omniprésentes sur nos smartphones. Elles permettent de faciliter le quotidien, d’acheter ou encore de se divertir. En 2024, les applications mobiles affichent un taux de conversion moyen de 5,6 %, soit trois fois supérieur à celui du web mobile. (Content square – Benchmark de l’expérience numérique).

Dans la mode, certaines applications deviennent des projets à part entière comme Vinted, pensée pour répondre au besoin de la vente de seconde main. Ces applications permettent de réaliser des transactions en ligne (vente, achat, location) suite à une mise en relation. Tandis que certaines sont collaboratives et misent sur les échanges entre particuliers, d’autres viennent prolonger l’expérience client d’une marque de mode, avec des services complémentaires tels que la réparation.

Derrière cette intuitivité, une application mobile reste un service numérique qui engage votre responsabilité en tant qu’éditeur. Les plateformes (App Store/Play Store) imposent leurs conditions, mais la responsabilité juridique finale vous revient. Et elle est large : mentions légales, CGU/CGV, RGPD, propriété intellectuelle, consentement, contrats, accessibilité, … etc.

Dans cet article, on vous propose un cadre clair sur les documents à prévoir, les obligations à anticiper, et les erreurs à éviter quand on lance une application mobile que ce soit pour une marque de mode ou pour un projet à part entière.

Une relation à trois niveaux

L’application est généralement publiée via une plateforme tierce comme l’App Store (Apple) ou le Play Store (Google). Ces stores assurent la diffusion technique. Ils peuvent imposer un cadre de publication (visuels, formats, accès, politique de confidentialité), mais ne prennent pas en charge vos obligations légales.

La relation juridique se noue entre vous et l’utilisateur. Cela signifie que vous êtes responsable :

  • du contenu affiché dans l’application (textes, visuels, fonctionnalités) ;
  • de l’information précontractuelle ;
  • de la conformité de l’expérience utilisateur avec le droit applicable ;
  • du traitement des données personnelles (RGPD) ;
  • de la documentation contractuelle (CGU, CGV, mentions légales, etc.) ;
  • de la gestion des réclamations, litiges ou demandes d’exercice de droits.

Même si vous externalisez le développement ou utilisez un outil no-code, c’est votre structure qui édite l’application et donc qui supporte l’ensemble des responsabilités juridiques.

Un cadre juridique à anticiper

Lancer une application mobile, c’est mettre à disposition du public un service numérique. À ce titre, vous entrez dans le champ de plusieurs textes législatifs :

  • La loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) impose des mentions légales précises, même pour les applications gratuites
  • Le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) encadre toute collecte ou traitement de données personnelles via l’application
  • Le Code de la consommation, dès que vous proposez un produit ou un service à destination de consommateurs (notamment pour les CGV, l’information précontractuelle ou le droit de rétractation)
  • Le Code de commerce, si votre application cible des professionnels ou repose sur une activité commerciale structurée.

Des obligations spécifiques peuvent également s’ajouter selon votre activité (économie circulaire, publicité, protection des mineurs…).

Une application mobile peut aussi être qualifiée juridiquement de plateforme soumise aux exigences notamment du DSA qui encadre la licéité du contenu disponible en ligne et favorise la transparence.

Quels documents juridiques prévoir pour lancer mon application mobile ?

Le lancement d’une application mobile implique la rédaction d’un ensemble de documents contractuels et informatifs, dont le contenu doit être adapté au modèle économique de l’application, à sa cible (consommateur ou professionnel), et à ses fonctionnalités. Ces documents ne sont pas accessoires : ils fondent juridiquement la relation entre vous et l’utilisateur, et conditionnent la conformité globale de votre projet.

Mentions légales : une obligation dès la mise en ligne

Les mentions légales sont exigées par l’article 6 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN), et doivent être accessibles depuis l’interface de l’application, quelle que soit sa nature (gratuite, payante, avec ou sans création de compte). Elles permettent d’identifier clairement l’éditeur du service : raison sociale, adresse, forme juridique, numéro SIRET, nom du directeur de publication et de l’hébergeur.

Il ne s’agit pas d’un simple formalisme : l’absence de mentions légales engage la responsabilité pénale de l’éditeur. Ces informations sont également un point de repère essentiel pour les utilisateurs, les autorités (CNIL, DGCCRF) ou en cas de litige.

Conditions Générales d’Utilisation (CGU) : le cadre de la relation

Les CGU encadrent les modalités d’accès et d’usage du service : qui peut utiliser l’application, dans quelles conditions, pour quelles finalités, avec quels droits et quelles limites. Elles permettent aussi à l’éditeur de se protéger contre les usages détournés, les abus, ou les tentatives de réclamation infondée.

Sur le fond, les CGU doivent préciser les règles de fonctionnement du service (inscription, modération, accès au contenu, modalités de désinscription), les obligations de l’utilisateur, les limites de responsabilité de l’éditeur, et les règles relatives à la propriété intellectuelle. Une clause de résiliation, des informations sur la disponibilité du service ou encore des précisions sur les conditions de modification de l’application peuvent y être intégrées.

Sur la forme, elles doivent être accessibles de manière stable et durable, et acceptées de façon explicite par l’utilisateur (ex. : case à cocher). Sans cela, elles ne sont pas juridiquement opposables.

Les CGU peuvent différer selon le type d’utilisateurs, par exemple selon le statut de professionnel ou de particulier de la personne qui utilise votre application mobile. Vous mettrez alors à disposition des CGU B2B et des CGU B2C.

Conditions Générales de Vente (CGV) : dès qu’il y a une transaction

Les CGV sont obligatoires dès lors que l’application permet la souscription à un service payant, un abonnement ou l’achat d’un produit.

Elles encadrent la relation commerciale entre l’éditeur de l’application et l’utilisateur, et doivent être disponibles avant tout acte d’achat.

Des clauses spécifiques à prévoir selon votre modèle

Selon votre projet, les CGV peuvent prendre des formes très différentes. Si votre application repose sur un modèle d’abonnement, de marketplace, de location ou de seconde main, il faudra aller plus loin que les clauses décrites ci-dessus.

💬 Prenons un exemple : vous êtes une marque de mode, et vous développez une application qui permet à vos clients de faire réparer leurs vêtements. Le service est proposé directement via l’app, avec un module de paiement intégré, une prise de rendez-vous, et une logistique de collecte ou de dépôt. Dans ce cas, vos CGV devront notamment préciser :

  • ce que comprend exactement le service (type de réparation, délais, exclusions),
  • à quel moment l’engagement devient ferme,
  • comment les frais sont calculés et réglés,
  • ce qui se passe en cas d’annulation, de produit irréparable, ou de désaccord sur le résultat.

Ces CGV devront également inclure les clauses prévues par le Code de la consommation : droit de rétractation, garanties légales, gestion des litiges.

Politique de confidentialité : un document obligatoire pour la conformité RGPD

La politique de confidentialité est un document autonome, distinct des CGU, qui doit informer l’utilisateur de manière précise sur le traitement de ses données. Elle est exigée par les articles 12 à 14 du RGPD et doit être facilement accessible depuis l’application, avant toute collecte.

Elle doit présenter par exemple  :

  • les catégories de données collectées,
  • les finalités du traitement (ex. : personnalisation, statistique, service client),
  • les destinataires des données (interne, prestataires, partenaires),
  • la durée de conservation,

💡 Certaines plateformes refusent de publier des applications qui ne comportent pas ce document, indépendamment même du traitement réel de données. C’est aussi sur ce document que s’appuiera la CNIL en cas de plainte ou de contrôle.

⚠️ Sa rédaction ne peut pas être standardisée, ni copiée : elle doit refléter les traitements réellement mis en œuvre dans votre application.

Je veux intégrer des traceurs dans mon app : que dois-je cadrer juridiquement ?

Dès que vous installez des outils pour suivre ce qui se passe dans votre application (par exemple : mesurer combien de personnes l’utilisent, voir les pages les plus consultées, afficher des publicités ou personnaliser le contenu), vous utilisez ce qu’on appelle des traceurs.

Sur mobile, ces traceurs prennent souvent la forme de SDK (Software Development Kit) Ce sont des petits modules fournis par des outils externes (Google Firebase, Meta…) que vous ajoutez à votre application pour suivre certains comportements.

Dès qu’un de ces traceurs collecte une information liée à une personne identifiable (adresse IP, identifiant du téléphone, géolocalisation, comportement), vous êtes concerné par le RGPD, et vous devez donc demander un consentement clair et explicite à l’utilisateur, avant toute collecte.

Ce choix doit être :

◾️ libre (refuser sans pression),

◾️ clair (comprendre ce qui est collecté),

◾️ spécifique (pouvoir choisir pour chaque usage),

◾️ actif (aucune case pré-cochée),

◾️ réversible (pouvoir changer d’avis facilement).

La règle est simple : si vous affichez un bouton “Tout accepter”, vous devez aussi afficher un bouton “Tout refuser”, au même niveau, avec le même niveau de lisibilité.

Comment mettre cela en place dans mon application ?

Sur un site web, on voit souvent une bannière de cookies. Dans une application mobile, cela peut prendre d’autres formes, mais les règles sont les mêmes.

Vous pouvez par exemple :

  • afficher un écran de consentement dès la première ouverture,
  • intégrer un module de paramétrage dans les réglages de l’application,
  • proposer un choix clair au lancement : accepter, refuser, ou personnaliser.

💡 L’important, c’est que le consentement intervienne avant tout suivi. Vous ne pouvez pas activer un traceur “par défaut”, sans que l’utilisateur ait donné son accord.

Cas pratiques : seconde main, location… les modèles circulaires dans la mode

De nombreuses entreprises développent aujourd’hui leur application mobile pour structurer un service circulaire : location, revente, dépôt-vente, ou mise en relation entre particuliers. Ces modèles, souvent innovants, impliquent des règles juridiques spécifiques à anticiper dès la conception de l’application.

Location entre particuliers

Si votre application permet à des utilisateurs de louer des vêtements entre eux, l’un des premiers enjeux à cadrer est la répartition des rôles : qui est responsable des biens loués ? Que se passe-t-il en cas de perte ou de détérioration ? Les CGU doivent encadrer ces usages, prévoir un système de médiation et intégrer des clauses spécifiques sur les litiges ou les défauts de restitution.

→ Voir notre article complet sur la location de vêtements

Seconde main entre particuliers

Une application dédiée à la revente de vêtements entre particuliers implique des obligations spécifiques, au-delà des CGU classiques. En tant qu’opérateur de plateforme, vous êtes tenu de cadrer votre rôle, de garantir une information transparente, et de maîtriser les risques liés à la diffusion de contenus par des tiers. Le cadre applicable relève à la fois du Code de la consommation, du droit des plateformes et des règles spécifiques à la vente de seconde main.

→ Voir notre article complet sur le business modèle de la seconde main

Notre accompagnement

Chez Le Droit à la Mode, nous accompagnons les projets qui souhaitent structurer et sécuriser leur activité, dès la conception de leur projet de mode.

Nous intervenons notamment pour :

  • la rédaction des CGU, CGV, politiques de confidentialité et mentions légales,
  • la gestion du RGPD et des traceurs SDK intégrés à votre application,
  • la relecture de vos parcours utilisateurs, pour garantir l’opposabilité des documents,
  • le dépôt de votre marque, y compris le nom de l’application, le logo et le nom de domaine,
  • la vérification des contrats avec vos prestataires (développeur, UX, hébergeur…).

Vous développez une plateforme circulaire, une app dédiée à la location ou à la seconde main ?

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