Stéphane Coundouris est consultante qualité et conformité dans le secteur des produits non alimentaires liés à l’enfance.
Depuis plusieurs années, elle consacre son expertise à ses clients notamment dans le secteur des jouets, du textile enfance et du mobilier.
Ses clients la questionnent souvent pour des problématiques annexes telles que les aspects juridiques des licences de marques.
Nous répondons aujourd’hui aux questions les plus fréquentes de ses clients.
Puis-je utiliser un motif émanant d’une marque connue pour ma création à partir du moment où ce même motif est vendu par mon fournisseur ?
Les règles de la propriété intellectuelle diffèrent des règles habituelles de la propriété. Dans le cas d’un achat d’un produit couvert par un droit de propriété intellectuelle, tel que le droit d’auteur sur un motif ou un dessin par exemple, l’acheteur ne possède que l’objet matériel mais pas la propriété intellectuelle sur l’élément protégé. Cet élément est en réalité une propriété “incorporelle”, indépendante de l’objet matériel auquel elle est rattachée (article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle).
En clair, cela signifie que les usages sont restreints à ce que le titulaire du droit de propriété intellectuelle autorise.
Si ce motif est couvert par un droit d’auteur par exemple, l’auteur de ce dernier est la seule personne investie des droits d’exploitation commerciale (article L.122-1 du CPI). Il peut choisir d’en faire bénéficier une autre personne, par le biais d’une cession de droit ( article L.122-7 du CPI)
Si ce motif est couvert par un droit de marque ou un droit de dessin et modèle, le principe est identique : le titulaire du droit à le droit exclusif d’exploiter commercialement l’objet, sauf s’il accorde une licence d’utilisation à une personne (L.513-2 CPI pour les dessins et modèle et L.714-1 CPI pour les marques).
Cette licence de marque ou cession du droit est nécessairement accompagnée de mentions obligatoires précisant notamment l’étendue temporelle et géographique, les supports autorisés et la rémunération.
Donc, le fait que votre fournisseur ait obtenu une licence pour commercialiser ce tissu ne signifie pas que vous bénéficiez d’un droit pour l’exploiter. Pour exploiter et commercialiser vous même ce tissu, il faudra conclure votre propre contrat de licence avec le titulaire de droit.
Le conseil Stéphane: Si vous transformez effectivement ce tissu en une création seconde destinée à la vente, vous mettez un nouveau produit sur le marché, différent du tissu original acheté. Vous n’êtes pas titulaire des droits sur les motifs du tissu pour autant.
Peut-on obtenir pour un montant forfaitaire l’accès à l’intégralité d’un catalogue d’images déposées d’une entreprise ou à un motif quel que soit l’article fini ?
En principe, ce n’est pas possible, car les contrats de licence sont des contrats spécifiques très encadrés en terme notamment de rémunération.
Si l’on reprend l’exemple d’un catalogue de motifs protégés par des droits d’auteur, le principe est que la rémunération de l’auteur est proportionnelle aux recettes perçues émanant de l’exploitation du motif (article L.131-3 CPI). La rémunération forfaitaire est exceptionnelle, uniquement utilisée dans le cas où il serait impossible de calculer une rémunération proportionnelle.
La licence définit l’étendue des droits et notamment les différents supports d’utilisation. Ainsi, même si la rémunération est forfaitaire, son montant variera en fonction de l’étendue de la licence de marque. Une utilisation sur tous supports (tous produits finis) sera plus onéreuse qu’une utilisation limitée. C’est une question de négociation.
Le conseil de Stéphane : La société à laquelle vous vous adressez va généralement vous demander de détailler précisément votre projet an premier lieu pour savoir si celui-ci est compatible avec ce qui est « véhiculé » par la marque, car elle doit avant tout protéger son image de marque.
Est-ce accessible aux petites entreprises de manière générale de négocier l’utilisation d’une licence de marque ?
Une licence de marque est un contrat, qui est par principe librement négociable par les parties (article 1102 du Code civil). En pratique, la force de négociation se trouve du côté du titulaire du droit de propriété intellectuelle dont vous souhaitez faire usage.
Le conseil de Stéphane: Seule la marque concernée peut vous donner les informations nécessaires pour évaluer la faisabilité de votre projet, c’est elle qui impose ses conditions. Vous pouvez vous renseigner directement sur le site internet des différents titulaires de droits. Faites vous accompagner par un avocat pour comprendre les subtilités des contrats de licence qui vous sont proposés et les négocier si besoin.
Quel est le risque si un titulaire de droits constate que j’ai utilisé dans mes créations un motif ou dessin lui appartenant ?
Cette situation crée un risque que le titulaire de droit engage un action en contrefaçon à votre encontre, étant donné que vous utilisez une oeuvre ou un titre lui appartenant sans son autorisation.
La contrefaçon est caractérisée par la reproduction ou représentation sans autorisation d’un droit d’auteur (article L335-3 du CPI), ou par l’exploitation d’un dessin ou modèle identique ou ne produisant pas une impression visuelle différente (article L.513-4 et L.523-5 CPI). Elle est caractérisée aussi par l’utilisation d’un signe de marque identique ou similaire pour des produits identiques ou similaires dans le cadre du droit des marques (article L.713-2 CPI).
Le conseil de Stéphane : La plupart des titulaires de droits rappellent ces interdictions dans leurs documentations contractuelles.
Est-ce la DGCCRF ou la douane qui constatent et informent la société concernée par l’utilisation de sa marque ?
La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ainsi que les Direction Générales des Douanes et des Droits indirects (DGDDI) sont deux institutions compétentes pour effectuer des saisies en cas de suspicion de contrefaçon.
En revanche, l’action de ces institutions est déclenchée en général par des signalements de particuliers, ou à la suite de demandes d’interventions des titulaires de droit (article R335-6 du CPI).
En pratique, les titulaires de marques très connues et souvent imitées surveillent activement le marché et s’informent des éventuelles contrefaçons.
Le conseil de Stéphane : Si vous êtes titulaire de marque ou d’oeuvre protégées par le droit d’auteur, c’est à vous d’organiser la surveillance de votre propriété intellectuelle. Un avocat peut vous aider à mettre en place une stratégie adaptée.
Je récupère des tissus et rubans « griffés » pour la confection de vêtements et accessoires upcyclés, est-ce autorisé s’agissant de matières de récupération ?
Aucune exception en ce sens n’existe à ce jour. En l’occurence, même si les tissus et autres éléments sont récupérés, le fait qu’ils soient porteurs d’éléments protégés par des droits de propriété intellectuelle suffit pour constituer une contrefaçon.
De nombreux titulaires de droits s’opposent à la pratique de l’upcycling, et surtout aux créateurs qui utilisent la notoriété des marques et éléments protégés comme argument de vente.
Aucun contentieux à ce sujet n’a encore émergé en France, mais plusieurs ont eu lieu aux Etats-Unis, qui ont opposé des créateurs d’upcycling et des maisons de mode, qui se sont soldés hors des tribunaux en faveur des maisons de mode.
Le conseil de Stéphane : La plus-value de votre produit devrait toujours être le fruit de votre créativité et de vos investissements, et pas la présence d’un logo sur lequel vous ne détenez pas de droits.
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